Conclusion

Limites

Pour en venir à la conclusion de notre enquête, il parait essentiel de mentionner ses limites ainsi que les quelques difficultés que nous avons pu rencontrer.

Tout d’abord, il nous a été difficile d’accéder à une grande base de sondés pour les résultats de nos enquêtes. Plus encore, il a été difficile d’accéder à un échantillon diversifié en termes d’âge, de profession, ou de catégories socio-professionnelles ou géographiques. Nous avons tenté de diversifier ces résultats en ciblant spécifiquement des personnes qui s’écartaient des profils des répondants au Questionnaire général (des étudiants de Sciences Po en majorité), mais cela nous a été difficile, de par notre statut d’étudiant. Le Questionnaire Fact-checking Formats et le Questionnaire Fact-checking statut englobent donc une population plus diversifiée, même si les étudiants (de Sciences Po mais pas seulement) sont encore sur-représentés par rapport à la population nationale.

En outre, se pose la question de l’échelle de comparaison. La manière de « débunker » une information n’est en effet pas la même dans un support textuel ou vidéo, de même pour un média établi et non-traditionnel. Se pose donc la question de la part du statut du média ou de la qualité du fact-checking dans l’efficacité du débunkage de l’information, deux données qu’il parait impossible de comparer de manière isolée. 

Principaux résultats

Plusieurs résultats et tendances ont tout de même émergé. Il faut tout d’abord noter que la santé est un domaine en marge des thématiques les plus traitées par les fact-checkers, mais il existe une réelle attente du public. Concernant les résultats de nos enquêtes, excepté pour le groupe « Fact-checking vidéo », nous avons assisté à augmentation significative de la part d’individus considérant l’information comme absolument fausse chez ceux ayant eu accès au fact-checking, amenant à corroborer l’hypothèse H1. La possession de connaissances solides semble globalement aussi être un facteur d’efficacité du fact-checking (hypothèse H2). Comme escompté, un fact-checking réalisé par un média traditionnel et reconnu fonctionne davantage que s’il est mené par un média nouveau (hypothèse H4). En revanche, et contrairement à nos attentes, l’utilisation d’une vidéo semble réduire l’efficacité du fact-checking – invalidant l’hypothèse H3 – même si nous avons vu que ce format possédait des atouts réels.

Apports personnels

En termes d’apports personnels, cette enquête nous a permis de saisir la globalité des enjeux de fact-checking que nous avons étudiés et de voir comment les méthodes de débunkage opèrent et évoluent. En outre, cette enquête nous a aussi permis de mieux saisir comment des outils numériques peuvent être utilisés pour saisir les enjeux des fake news et du même coup du fact-checking.

Grâce à la lecture d’études, nous avons compris que les fake news, comme le fact-checking, n’ont pas un effet direct mais bien des effets limités sur les individus qui y sont confrontés. Nous avons donc relativisé l’impact du fact-checking, tout en restant convaincu de ses bénéfices pour la société. Cela a déjà modifié notre manière de lire ou de regarder des contenus de fact-checking. Nous portons une plus grande attention aux formats utilisés, aux sources ainsi qu’au caractère convaincant ou non des arguments. Pour l’une d’entre nous, cette exploration a confirmé sa volonté de construire une vie professionnelle dans le domaine des médias tout en mobilisant des outils numériques.

Enfin, nous avons appris beaucoup en termes de processus de recherche en réalisant toutes les étapes (choix du sujet et du processus d’enquête, rédaction des questionnaires, direction d’entretiens, analyse des résultats) et nous sommes certains que cela nous sera bénéfique par la suite.

Pistes de recherches

Face à l’enjeu du fact-checking, des pistes de recherche peuvent être explorées, qui dépasseraient l’échelle d’un travail comme celui-ci. La première amélioration est évidemment la qualité et quantité des échantillons. Avec des moyens plus importants, un échantillon aléatoire ou par quota, proche de la fiabilité de ceux de certains instituts de sondage, aurait pu permettre de révéler des résultats plus précis, et d’établir des comparaisons entre les types de répondants (en fonction de l’âge, de la profession, de la situation géographique). 

Une piste de questionnement intéressante pourrait être de savoir comment une source d’information adapte son format de fact-checking, entre un article textuel, une vidéo, une infographie, par un journaliste ou une personnalité, etc. Ce positionnement se fait-il par rapport au type de fake news ? À son ampleur ? À la dangerosité potentielle de son impact ?  Se fait-il par rapport au type de public qui est susceptible d’être touché par la fake news ou bien du public qui consomme le contenu de ce média ? Pour cela, il serait essentiel de mener des entretiens auprès de fact-checkers ou des observations dans des rédactions pour mettre au jour les mécanismes de production du contenu du fact-checking et les contraintes auxquelles les fact-checkers sont soumis.

Une comparaison entre différents pays pourrait aussi être toute pertinente. Comparer des pays où le fact-checking est établi (comme aux Etats-Unis, berceau du fact-checking) et des pays où celui-ci constitue une pratique plus récente pourrait permettre de cerner l’impact de la (re)connaissance de la pratique sur son efficacité.

Une dernière question pourrait être de savoir dans quelles mesures il peut exister une polarisation du fact-checking ? Si un petit groupe d’acteurs médiatiques contrôle à la fois la diffusion d’informations primaires et la diffusion de fact-checking, cela peut poser une réelle question sur les risques que cela peut engendrer. La présence de contre-pouvoir, de contre-balance, d’acteurs exogènes au milieu médiatique et surtout d’un esprit critique et éclairé: tout cela paraît fondamental face à ce qui est soulevé en termes d’enjeux du numérique.

Antoine CHOSSAT

Lise KIENNEMANN

Alexandre POTIN

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